209 pages d’amendements et une pluie de textes législatifs plus tard, la Loi 96 a redessiné les contours linguistiques du Québec. Depuis le 1er juin 2022, la transmission d’un contrat d’adhésion à un consommateur au Québec dans une langue autre que le français n’est plus permise, sauf exception stricte. Les entreprises doivent désormais soumettre la version française en premier, avant toute traduction.
Certaines communications internes, auparavant tolérées en anglais, sont dorénavant soumises aux mêmes exigences linguistiques que les documents officiels destinés au public. De nouvelles sanctions administratives pèsent sur les contrevenants. Ces ajustements modifient de façon concrète les pratiques commerciales et les interactions quotidiennes dans la province.
Loi 96 au Québec : ce qui change vraiment pour la langue française
La loi 96, fraîchement adoptée après la sanction royale, marque un tournant majeur pour la charte de la langue française. Le texte ne se limite plus à faire du français la langue commune du Québec : il déroule tout un arsenal de mesures qui s’appliquent à la vie administrative, économique et sociale. Le processus de francisation gagne en ampleur. Les nouvelles dispositions modifient les règles, renforcent la vigilance et étendent clairement le champ d’application.
En pratique, toutes les communications écrites, orales ou numériques des entreprises et des administrations passent désormais par le filtre du français. La version anglaise n’ouvre plus le bal. Qu’il s’agisse de contrats, de notes de service ou de documents officiels, la version française s’impose toujours en tête. L’Office québécois de la langue française (OQLF) dispose de nouvelles prérogatives de contrôle, avec des sanctions financières nettement alourdies pour ceux qui font fi des règles.
Pour mieux cerner les principales mesures, voici ce que les entreprises doivent appliquer sans détour :
- Remettre d’abord en français tout contrat d’adhésion destiné au public.
- Afficher une présence significative du français sur les marques de commerce, sauf rares exceptions prévues par la loi.
- Justifier systématiquement toute exigence de maîtrise d’une langue autre que le français pour les employeurs.
La réforme touche également l’organisation scolaire et le fonctionnement de la justice. Les échanges avec les tribunaux et l’administration publique s’effectuent en français, sauf rares cas expressément prévus. Les entreprises, dès 25 salariés, doivent engager une démarche de francisation. De leur côté, les citoyens voient leur droit d’obtenir des services en français renforcé, confirmant le français comme langue de travail et de service partout au Québec.
Entreprises, citoyens : à quoi s’attendre concrètement avec les nouvelles obligations linguistiques ?
Le temps de la souplesse est révolu. Avec la loi 96, chaque contrat d’adhésion, qu’il concerne une assurance, un service ou un abonnement, doit d’abord être remis en français. Ce n’est qu’en cas de demande claire et volontaire que la traduction peut suivre. Les publicités commerciales et l’étiquetage des produits doivent eux aussi placer le français au premier plan. Les marques enregistrées fédéralement bénéficient encore de quelques dérogations, mais le français doit occuper une place visible sur la signalisation.
Pour illustrer les nouvelles obligations qui s’imposent, voici les points majeurs à retenir :
- L’OQLF resserre sa surveillance. Les entreprises comptant entre 25 et 49 employés sont à présent soumises, tout comme celles de 50 salariés et plus, à l’obligation de francisation.
- Toutes les communications internes (notes, manuels, directives) doivent être disponibles en français.
- Pour exiger la connaissance d’une autre langue que le français, il faut désormais prouver que c’est indispensable au poste visé.
Les citoyens profitent pour leur part d’un accès élargi à des services publics en français. Les démarches auprès de l’administration, de la justice ou des organismes gouvernementaux se font automatiquement dans la langue officielle. Les exceptions se restreignent. Conséquence directe sur le marché du travail : les profils francophones sont recherchés, la maîtrise du français devient un atout encore plus valorisé.
La sanction royale donne à ces nouvelles règles un effet immédiat. Toutes les entreprises, peu importe leur taille, doivent réviser leur code de conduite, revoir la rédaction de leurs documents et ajuster leur gestion documentaire. L’enjeu va au-delà du respect des pénalités : il s’agit d’adhérer à une nouvelle norme sociale, où le français n’est plus une option mais la référence incontournable.
Réussir sa mise en conformité : conseils pratiques pour s’adapter sereinement à la Loi 96
La mise en conformité avec la loi 96 redéfinit les habitudes de travail au sein des entreprises québécoises. Le texte laisse peu de place à l’improvisation : il impose que chaque contrat, document interne ou communication externe réponde strictement aux exigences du français. Pour s’adapter, plusieurs étapes structurent le passage à la conformité :
Premiers réflexes à adopter
Avant toute chose, il convient de dresser un état des lieux précis et d’organiser la transition méthodiquement :
- Recensez l’ensemble des documents et supports utilisés quotidiennement : contrats, politiques RH, manuels, infolettres.
- Passez en revue la qualité de chaque version française. Traduire ne suffit plus : il faut privilégier la rédaction originale en français.
- Mettez en place un comité de francisation si l’effectif atteint ou dépasse 25 personnes, conformément aux nouvelles modalités.
- Prévoyez des formations ciblées pour renforcer la maîtrise du français professionnel au sein des équipes.
La relation avec l’Office québécois de la langue française (OQLF) prend un relief particulier. Chaque dialogue permet d’améliorer les procédures et d’anticiper les inspections. Le suivi documentaire ne doit pas être négligé : réaliser des audits internes réguliers aide à détecter les points faibles et à ajuster rapidement.
Il faut aussi se préparer à expliquer toute exception. La loi prévoit des dérogations spécifiques à l’usage d’une langue autre que le français, mais la justification doit être solide et documentée. Cela implique aussi d’ajuster ses méthodes de recrutement : chaque offre d’emploi, chaque test, chaque fiche de poste doit répondre aux exigences de la charte de la langue française. Cette vigilance ne saurait être ponctuelle. Elle devient une habitude, un réflexe qui s’inscrit désormais dans la durée.
La Loi 96 impose un nouveau rythme. Ceux qui sauront s’ajuster feront du français le cœur battant de leur organisation. Les autres risquent de se heurter à une réalité implacable : au Québec, le français avance, et il ne compte plus faire marche arrière.


